Stella et l'Amérique

Stella vend son corps. Elle n’est pas vraiment une call-girl de luxe, elle
travaille dans son camping-car et accompagne un cirque itinérant minable.
Stella aime son métier et ses clients, se donner avec sincérité et tendresse,
ça peut faire des miracles. Et, au sens propre, ça en fait, des miracles.
Après avoir couché avec elle, les paralytiques remarchent et les aveugles
retrouvent la vue. Bientôt le bruit court dans la région qu’il y a une fille
qui… La file d’estropiés s’allonge devant sa caravane et Stella est quand même
bien embêtée par cette célébrité inattendue. Elle n’est pas la seule : quand
le Vatican a vent de l’histoire, le Pape commence par se réjouir : des
miracles avérés, une sainte véritable, en Amérique en plus, de quoi illuminer
son pontificat ! Mais quand il apprend le modus operandi de ces guérisons
miraculeuses, ses espoirs s’effondrent. Une sainte putain, ça va vraiment pas
être possible… En revanche, une sainte martyre, dont on peut réécrire le
passé, voilà la solution. Et les affreux frères Bronsky, mercenaires & tueurs
à gage, seront parfaits pour le job. Le Vatican a des ressources inattendues.
Heureusement, Stella peut compter sur le Père Brown pour couvrir ses arrières.
Ce prêtre ex-Marines a vite compris les manœuvres de sa hiérarchie et va
retrouver ses anciens réflexes pour contrer les Bronsky. Commence alors un
road-trip déjanté à travers les États-Unis, destination ultime : Las Vegas.
Là-bas, le Père Brown espère organiser un grand show, « à l’américaine »,
Stella fera ses miracles en direct et le Vatican ne pourra plus rien contre
une sainte télévisuelle à la renommée planétaire. C’était sans compter
l’intervention de la vénéneuse Brenda Moore… Après les fresques sociales et
politiques de ses derniers romans, Joseph Incardona retrouve la verve
burlesque et parfois grinçante de Chaleur. Personnages hauts en couleur tout
droit sortis d’un pulp à la Tarantino, scénario improbable mené de main de
maître à la Guillermo del Toro, dialogues dignes des frères Coen, Incardona
fait son cinéma et c’est jubilatoire! Écrivain italo-suisse, Joseph Incardona
est l’auteur d’une vingtaine de romans dont la Soustraction des
possibles(Finitude, 2010) et Les Corps solides (Finitude, 2012). Comme on doit
rendre ce qu’on a reçu, il rend souvent hommage à la littérature américaine
qui l’a nourri. Avec Stella et l’Amérique il paie, entre autres, son tribut à
Harry Crews.