Mouloudji, biographie
EAN13
9782809801859
ISBN
978-2-8098-0185-9
Éditeur
Archipel
Date de publication
Collection
ARTS ET SPECTAC
Nombre de pages
434
Dimensions
10 x 10 x 2 cm
Poids
544 g
Langue
français
Code dewey
782.421
Fiches UNIMARC
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Mouloudji

biographie

De

Archipel

Arts Et Spectac

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DU MÊME AUTEUR

Nuages, roman, L'Harmattan, 2009.

Le Cabaret « rive gauche » : de la Rose rouge au Bateau ivre, 1946-1974, L'Archipel, 2006.

1 franc, ou l'Étonnante destinée de six grammes de nickel, chronique romanesque, avec Thomas Schlesser, L'Harmattan, 2001.

Abracada pub : contes et légendes de la publicité, Institute, 1991 ; L'Harmattan, 2002.

Trois bulles d'éternité, roman, Presses de la Renaissance, 1991.

Nomade's Land, Caractères, 1989.

49 poégraphies, La Pensée universelle, 1984.

La Natchave, Denoël, 1970.

www.editionsarchipel.com

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eISBN 978-2-8098-0954-1

Copyright © L'Archipel, 2009.

À Sanda Slag

« Approcher Mouloudji, c'est respirer quelques effluves d'un airqui fait rêver les possédés de l'émotion. Autour de lui rôdent Duha-mel, Prévert, Cocteau, Adamov, Blondin, Blin, Beauvoir, Sartre,Genet, Raimu, Artaud, Kessel, Vian et tous les autres. [...]Libre denaissance, il s'est souvent trouvé quand il fallait où il fallait. [...]Mouloudji n'est pas le plus grand du music-hall, le plus grand ducinéma, le plus grand du théâtre, le plus grand de la peinture, leplus grand de l'écriture, il est Mouloudji, indépendantissime, horscoteries, hors système mercantile et son parcours toujours en mou-
vement est parsemé de jalons indestructibles. »

Alain Poulanges

« Il m'a toujours semblé que la voix de Mouloudji était, d'abord, celle de la tendresse. »

Max-Pol Fouchet

« Mouloudji était extraordinairement jeune. C'était quelqu'un d'une grande naïveté. Il symbolisait l'enfance rayonnante. C'était un homme très poétique, ludique, hors du temps. »

Juliette Gréco

« L'autre enfant perdu de la guerre adopté par Saint-Germain-des-Prés et confié à la chanson est un enfant prodige. [...]De son sourire éclairant une bonne tête de titi, chemise blanche à col ouvert et pantalon noir, “Moulou” déclenche dans le public des ondes de tendresse qu'il semble ignorer ; sa voix musarde entre les voyelles et affiche un goût prononcé pour le mélisme – la rive kabyle de sa mémoire –, colorant de manière très personnelle ses chansons. »

Jean-Claude Klein

« L'enfance de Mouloudji est l'histoire d'une intégration : pas au sens trivial où l'entendent certains, peu soucieux d'anachronismes, qui voient en lui le “premier Beur de France”. Non : celle de l'intégration d'une façon de penser qui n'est pas celle de sa couche sociale d'origine. Une rapide inculcation de ce qu'un autre sociologue, Pierre Bourdieu, appelle la “disposition cultivée”: une aisance, une gratuité, un détachement du regard qui ne sont que l'expression d'une distance réelle vis-à-vis de la nécessité économique. La nécessité que l'on a connue, et que l'on ne veut surtout plus connaître. »

Jean-Claude Demari

« Mouloudji savait tout faire. Il écrivait, il chantait, il peignait. Je garde le souvenir de quelqu'un de très drôle. On s'amusait beaucoup. Il n'a jamais été très carriériste. Il prenait les choses comme elles venaient. Il posait sur celles-ci un regard de poète. »

Catherine Sauvage

« Vous connaissez quelqu'un qui, dans son métier, ait réussi toute sa vie à n'en faire qu'à sa tête, qui soit arrivé à mourir à un âge avancé en parfait état d'adolescence, désarmant de charme et d'impertinence, pardonné d'avance, ironique, tendre, secret, incorrigible, merveilleusement scandaleux ? »

Yvan Audouard

« C'est la mort d'un adolescent que je pleure, un adolescent qui avait le génie des adolescents. Ce génie que l'on perd soi-disant quand on devient adulte, il l'a gardé toute sa vie. »

Georges Moustaki

« Il est parti comme il était venu, secret et mystérieux. »

Annabelle Mouloudji

Avant-propos

« Quand je ne serai plus, ils n'ont pas fini de déconner. Ils me connaîtront mieux que moi-même. »

Jacques Prévert

Je ne connaissais guère l'homme au petit coquelicot. Quatre cents pages plus tard, au terme d'innombrables heures de recherches, d'entretiens, de témoignages, je ne le connais pas vraiment mieux. L'homme échappe. Non qu'il soit silencieux : tout au contraire, il parle, se raconte. Mais tout ce qu'il dit, ce qu'il chante, ce qu'il peint, ce qu'il écrit, tout se dérobe. Mouloudji l'Oxymore reste insaisissable.

Pour qui a vingt ans aujourd'hui, Mouloudji n'a jamais existé. Pour d'autres, à partir de la quarantaine, Mouloudji se confond avec quelques chansons : « Le Déserteur », « Comme un p'tit coquelicot », « La Complainte des infidèles », « Un jour, tu verras »... Pour d'autres encore, plus près de la soixantaine, Mouloudji représente la chanson rive gauche de l'immédiat après-guerre, la légende de Saint-Germain-des-Prés, les années Sartre, Queneau, Vian, Prévert.

Approcher Mouloudji, c'est l'accompagner au long d'une vie dont le sens semble lui échapper, comme s'il avait vécu à côté de lui-même. Une vie infiniment fertile, mais une vie non choisie, régie par la nostalgie de l'enfance.

« En devenant chanteur, écrit-il, je perdis le goût du bonheur. » Ainsi commence Le Coquelicot1, dernier livre de souvenirs de cet artiste protéiforme qui va bientôt mourir, à soixante et onze ans, et retrouver – peut-être – le grand imprésario qui l'enverra « chanter d'étoile en étoile » pour l'éternité.

Cette interrogation sur l'impossible bonheur va trouver sa réponse bien tardivement : « En relisant mes gribouillages, je tombai sur le souvenir d'un soir où, porte de la Villette, une mendiante plantée dans la rue avait chanté une complainte que je connaissais depuis mon enfance :

Viens maman, on t'regarde
On t'appelle la pocharde
Tu te tais... Tu n'dis rien
Tes pauvres yeux semblent éteints
C'que c'est moche cette foule
Qui se moque d'une femme saoule...

Submergé par les sanglots, j'avais caché mon visage derrière mes mains. M'était revenu le souvenir de la mère, son cortège de tristesse et d'égoïsmes. On avait expulsé la pauvresse. Tout en moi m'ordonnait de prendre sa défense. Je n'en avais rien fait, comme quand, petit enfant, j'accompagnais la mère au marché pour faire les courses. Lorsque, en proie à une crise, elle gesticulait, insultait d'invisibles tortionnaires, bassement, je lâchais sa main. En hypocrite, je la suivais à distance, feignant de ne pas connaître celle que les ménagères traitaient de folle2. »

Un an avant sa mort, Mouloudji comprend enfin les causes de son épouvantable trac lorsqu'il entre en scène : toute forme d'exhibition le ramène à sa mère. La foule, ce « mille-têtes », voit et juge sa non-assistance à mère en danger. « Dès lors, conclut-il, chaque fois que je me présentais devant une foule, j'éprouvais le même dégoût de moi-même, mélange de honte, de lâcheté et de mépris, comme si je me reprochais les désertions de mon enfance, quand ma mère se donnait en spectacle. J'avais caché toute ma vie ce remords d'enfant, mygale tapie dans ma tête3. »

De tous les grands artistes orphelins de l'amour Mouloudji apparaît comme l'un des plus pathétiques. Mais, s'il semble parfois écrasé par son péché originel, il gardera toute sa vie la grâce, la légèreté et la créativité de l'enfance, accompagnées d'un sourire au charme absolu et d'un humour dévastateur.

Voici donc l'histoire d'un homme-enfant au destin étonnant auquel les fées ont tout donné, sauf l'essentiel: l'amour d'une mère.

1

L'enfant bohème

Marcel Mouloudji voit le jour le 16 septembre 1922, à l'Hôtel-Dieu, près de Notre-Dame. Eugénie, sa mère, est née en 19011. Elle est bretonne. Saïd, son père, est né près de Constantine en 1896. Il est kabyle. Physiquement, chez l'enfant, l'ascendance méditerranéenne l'emporte largement dans le cocktail génétique. Il sera brun, de taille moyenne et relativement « typé ».

Marcel a un frère, André, d'un an son cadet. De santé fragile, souvent malade, il a été renversé par un taxi à l'âge de six ans, accident assez grave qui a provoqué chez sa mère un début de paranoïa et une nette préférence filiale. André est breton, Marcel est « arabe »: « Elle le chérissait autant qu'elle me détestai...
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