Résister : de Mauthausen à mai 68, De Mauthausen à Mai 68
EAN13
9782809800494
ISBN
978-2-8098-0049-4
Éditeur
Archipel
Date de publication
Collection
POLITIQUE, IDEE
Nombre de pages
244
Dimensions
10 x 10 x 2 cm
Poids
320 g
Langue
français
Code dewey
920
Fiches UNIMARC
S'identifier

Résister : de Mauthausen à mai 68

De Mauthausen à Mai 68

De

Archipel

Politique, Idee

Indisponible

Autre version disponible

DU MÊME AUTEUR

Le Mai de la CGT, Julliard, 1972.

Lutter, conversation avec Philippe Dominique, Stock, 1975 ; Le Livre de poche, 1978.

Le 1erMai, les 100 printemps, Messidor/Éditions sociales, 1989.

La Grève, L'Archipel, 1993.

En couverture : négociations de Grenelle,
ministère du Travail, 25 mai 1968.
sur le côté gauche, on reconnaît René Buhl,
Jean-Louis Moynot, Benoît Frachon et Henri
Krasucki. Derrière Georges Séguy (de face) :
André Berteloot.

www.editionsarchipel.com

Si vous souhaitez recevoir notre catalogue et
être tenu au courant de nos publications,
envoyez vos nom et adresse, en citant ce
livre, aux Éditions de l'Archipel,
34, rue des Bourdonnais 75001 Paris.
Et, pour le Canada, à
Édipresse Inc., 945, avenue Beaumont,
Montréal, Québec, H3N 1W3.

eISBN 978-2-8098-1094-3

Copyright © L'Archipel, 2008.

À ma famille

Avant-propos

En mai 2005, lors du soixantième anniversaire de la victoire sur l'Allemagne nazie et de la libération des camps de la mort, journaux, radios et télévisions m'ont sollicité pour témoigner de mon internement à Mauthausen, de mars 1944 à mai 1945. Cette médiatisation évoquant mon engagement dans la Résistance dès quinze ans, mon arrestation par la Gestapo à dix-sept ans suivie de ma déportation, a surpris nombre de ceux qui ne connaissaient de mon parcours que mes responsabilités syndicales. Du coup, l'idée de raconter ces trois premières années de ma vie militante m'a été vivement suggérée, non seulement par plusieurs de mes amis, mais par des personnes de différentes sensibilités : historiens, enseignants, élus, sans oublier les nombreux élèves des lycées ou des collèges où je suis fréquemment invité à témoigner – sans jamais le regretter – de ce que furent la Résistance et la barbarie nazie.

À l'occasion de ce soixantième anniversaire, j'ai en outre entendu de hauts responsables de l'État insister sur l'importance du « devoir de mémoire » relatif à la monstruosité du nazisme et aux quatre années noires durant lesquelles la France fut gouvernée par un pouvoir complice de l'occupant hitlérien. Ces multiples incitations m'ont donné à réfléchir : si mon témoignage pouvait contribuer à instruire la mémoire collective, et spécialement celle des nouvelles générations qu'intéressent ces pages de notre histoire nationale, je n'avais pas à hésiter. En quelques semaines, j'ai couché sur le papier, sans autres références que ma propre mémoire, l'essentiel de mon itinéraire, depuis mon entrée en Résistance dans les rangs des Francs-tireurs et partisans français (FTPF) en 1942 jusqu'à mon retour de Mauthausen en mai 1945.

Ce récit, où l'héroïsme des patriotes résistants n'a d'égal que la férocité des nazis allemands et français, aurait pu être publié vers la fin de l'ann ée 2006. Deux raisons ont différé la date de parution; d'une part, l'approche des élections présidentielles et législatives, peu propices au lancement d'un livre portant sur un tel sujet ; d'autre part, une nouvelle suggestion de plusieurs de mes camarades. « Pourquoi ne prolongerais-tu pas ton témoignage en évoquant la suite de ta vie militante syndicale et politique, notamment les moments où, investi de hautes responsabilités à la direction de la CGT, tu as pris des positions au sujet desquelles subsistent encore, de nos jours, nombre d'interrogations ? Admets qu'il serait absurde de laisser s'évaporer avec le temps ce que tu sais à ce propos. Ne crois-tu venu le moment de répondre à ces interrogations ? »

Cette incitation à la franchise m'a convaincu. Je l'ai comprise comme l'expression d'une volonté positive : ne laisser subsister aucune zone d'ombre dans l'histoire de la CGT dont je fus le témoin et prévenir toute interprétation imaginaire ou malveillante de cette période dont je veux commencer par rappeler les grandes étapes.

Après mon retour de déportation, j'ai commenc é à dix-huit ans mon activité syndicale au sein du syndicat CGT des cheminots de Toulouse. Dès lors, mes responsabilités syndicales et, par voie de conséquence, politiques se sont succédé à un rythme peu ordinaire. Né en 1927, je suis devenu secrétaire de la Fédération nationale des cheminots en 1949, puis membre du comité central du parti communiste (1954) et de son bureau politique (1956), puis secrétaire général de la Fédération des cheminots (1961). Entré au bureau confédéral de la CGT en 1965, j'ai été élu deux ans plus tard secrétaire général de ce grand syndicat. En 1982, à cinquante-cinq ans donc, fort de cette longue et passionnante expérience, j'ai quitté ce poste pour me consacrer à l'Institut d'histoire sociale CGT, en tant que président, mais aussi à un mouvement pacifique réunissant des personnalit és d'horizons différents : l'Appel des cent pour la paix.

Durant ces quatre décennies, d'importants événements ont marqué le monde en général, la France en particulier. La CGT, qui s'est toujours fixé pour règle de ne pas être en marge des évolutions nationales et internationales, n'est pas restée indiff érente à cette actualité, dont certains aspects la concernaient directement ou indirectement. Elle continue d'ailleurs de s'impliquer, de se prononcer sur les évolutions, les changements et autres transformations intervenus depuis la Libération.

Dans le cadre de mon engagement syndical, je pense en particulier à la scission syndicale de 1947-1948, qui vit la création de Force ouvrière, aux grèves de 1947, à la grève de 1953, à la guerre d'Algérie en 1954, au XXe congrès du parti communiste d'Union soviétique (PCUS) en 1956, à l'avènement de la Ve République en 1958, à l'accord d'unité d'action CGT-CFDT en 1966, à Mai 68, au Programme commun de la gauche en 1972 et à sa rupture cinq ans plus tard, à l'année 1978 qui vit la crise de la Fédération syndicale mondiale (FSM) et le 40e congrès de la CGT, à la disparition de l'URSS en 1991. Autant d'événements qui ont profondément marqué notre société et sur lesquels je reviendrai. Certains ont suscité d'importants débats au sein de la CGT. À ces occasions, des opinions diverses, parfois diff érentes, voire divergentes, se sont exprimées mais n'ont guère dépassé les limites internes de la CGT. Aujourd'hui, nous pouvons parler de ces pages de notre passé en toute quiétude.

Sans prétendre écrire l'histoire complète de ces quatre décennies, je veux apporter mon concours en toute sincérité, en racontant comment j'ai travers é certaines de ces périodes et en rapportant, y compris sous forme d'anecdotes, les moments les plus mémorables de mon itinéraire syndical. Plusieurs de ces épisodes alimentent encore controverses et polémiques. En expliquer les ressorts et la signification peut concourir à mieux les comprendre et à éclairer certains pans de notre histoire et de notre actualité. Si mon modeste témoignage peut y contribuer, je suis persuadé que personne ne me reprochera de l'avoir écrit.

1

UNE ADOLESCENCE COMBATTANTE

Résister... Si j'ai toujours accordé à ce verbe une importance déterminante, il prend un sens particulier en 1944. Mon éducation, les rencontres, mes propres convictions vont en effet me précipiter dans une actualité brûlante, et en toute conscience. Jusqu'à cette arrestation qui constitue l'élément clé de mon futur engagement militant.

Le jour du destin

Toulouse, le 4 février 1944. Midi va bientôt sonner. Il faut imaginer la rue de la Croix-Baragnon 1, grouillante de vie à l'heure du déjeuner. Située à 200 mètres de l'église Saint-Étienne, et à 150 mètres de la rue des Trois-Banquets, elle court parallèlement à l'une des grandes artères de la ville, la rue de Metz. Au numéro 23, les ouvriers s'affairent dans les locaux d'Henri Lion qui tient une imprimerie dite « de labeur », parce qu'elle ne dispose pas de gros moyens de production.

Henri Lion? Un patron atypique, libertaire et antifasciste. Dès 1941, il s'est engagé dans la Résistance à l'occupant et au pouvoir de Vichy. Sa mission: fournir toutes sortes de documents, du simple tract aux fausses cartes d'identité, en passant par les certificats de travail et les livrets de famille nécessaires aux clandestins. De ses presses sortent aussi des éditions régionales de la presse interdite : L'Humanité, Combat, Franc-tireur, Libération-Sud, Le Pa...
S'identifier pour envoyer des commentaires.